Les paras cassent les codes avec le nouveau carnet de chant interactif de la 11e BP

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Axel
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Les paras cassent les codes avec le nouveau carnet de chant interactif de la 11e BP

Message par Axel »

Les paras cassent les codes avec le nouveau carnet de chant interactif de la 11e BP
La 11e Brigade parachutiste diffuse dans ses unités un nouveau carnet de chants “interactif”. Bien que d’apparence très classique, il ne ressemble à aucun de ceux qui ont été édités jusque là. Pour en savoir plus, nous avons posé quelques questions à l’un de ses concepteurs, Thierry Bouzard, récent auteur de L’Orchestre militaire français (éd. Feuilles, 2019) .

Pourquoi éditer un carnet de chants ? Il existe déjà des éditions réalisées par les régiments, ainsi qu’une édition commerciale, vous n’allez pas faire une concurrence inutile ?
Tout d’abord, vous n’êtes pas sans savoir que le commandement se préoccupe depuis longtemps de la dégradation de la pratique du chant dans l’armée (ralentissement, ton trop bas, fin de phrases avalées, …). Déjà en 1980, le CEMAT avait diffusé une directive à ce sujet. La situation ne s’est pas améliorée, malheureusement. Si les chansons de soldats constituent le dernier répertoire de chants de métier, la disparition de nombreux orchestres militaires avec la suppression de la conscription n’a fait qu’amplifier le phénomène. Sans qu’il y ait de rapports entre les répertoires, les musiciens offraient des repères musicaux professionnels dans les unités. Ces orchestres existaient règlementairement depuis l’ordonnance de 1766. Depuis leur disparition les soldats sont livrés à eux-mêmes car ils ne sont généralement pas musiciens et que le chant se transmet à l’imitation. Partant de ce constat, les réalisateurs de ce nouveau carnet ont voulu exploiter les moyens offerts par les nouvelles technologies.

A première vue ce n’est qu’un carnet de chants comme les autres, quelles sont les innovations de votre édition ?

L’innovation principale est de fournir au soldat les mélodies de tous les chants, connus, oubliés et nouveaux. Elles sont en ligne, accessibles et téléchargeables par tous avec les codes QR . La lecture de la musique n’étant pas au programme de l’école, le soldat ne lit pas les partitions. L’enseignement d’un chant dans l’armée se fait donc exclusivement à l’imitation, et quand le modèle est une mauvaise vidéo prise sur Youtube… Avec ce carnet, le soldat trouve à sa disposition des musiques irréprochables. Elles ont été réalisées par Gérard Eiselé, le même musicien qui a transcrit les partitions du Grand Recueil des chants parachutistes. Ces fichiers-sons sont téléchargeables librement. Accessibles à tous, ils sont appelés ainsi à servir de nouveau standard.

Vous parlez d’esthétique, mais vos fichiers-sons en musique synthétique sont loin d’être esthétiques ?
C’est délibéré, il ne s’agit pas de musique à écouter pour le plaisir, mais d’un outil de travail pour apprendre. L’objectif est de fournir un modèle musical irréprochable. Il fournit tous les éléments nécessaires au soldat pour bien chanter et à l’encadrement pour s’assurer que la pratique est correcte.
De plus, ces fichiers ne sont pas des enregistrements que l’on aurait tendance à imiter. Ils fournissent un guide et laissent toute latitude à la troupe pour les interpréter. Il n’existe pas de version officielle des chants, une unité peut donc décider d’adapter des paroles à son propre usage, et parfois modifier la mélodie en conséquence. Les limites sont celles de l’esthétique et du bon goût.

1 https://theatrum-belli.com/a-lire-lorch ... un-modele/
2 Les fichiers-sons : http://www.chants-parachutistes.fr/page ... chutistes/



Vous publiez les paroles avec des indications supplémentaires que l’on ne trouve pas habituellement dans les carnets de chants militaires, pourquoi compliquer la lecture ?
En effet, les paroles ont été “augmentées” avec des indications complémentaires (pied de départ, temps forts, temps muets), sans gêner pour autant la lecture. Le chant militaire est souvent utilisé dans les déplacements ces indications permettent de respecter les temps forts et les temps muets, évitant ainsi de se retrouver à contrepas. Le respect des toniques du texte était déjà évoqué dans le TTA 107 en 1980, comme en 1970 par le capitaine Selosse, sans proposer de solution pratique. L’apport des nouvelles technologie permet de résoudre facilement ces problèmes.

Vous avez ajouté des battements dans les fichiers-sons, quelle est leur fonction ?

Comme les paroles, les fichiers-sons ont aussi été “augmentés” car on y retrouve les temps forts marqués par la grosse caisse et les temps muets marqués par la caisse claire. Ils correspondent aux indications introduites avec les paroles. Ils vont faciliter l’apprentissage des chants en fournissant le bon ton de départ et la bonne cadence d’exécution.
Ainsi le soldats non musiciens, comme l’encadrement ont des documents musicaux de référence accessibles à tous – ils sont téléchargeables – pour une exécution esthétique des chants.

Vous expliquez que certains chants commencent sur le pied droit, mais le pas cadencé part toujours du pied gauche, n’est-ce pas contradictoire ?
Le capitaine Selosse dans ses conseils pour chanter aux légionnaires et l’édition de 1980 du TTA 107 faisaient déjà la remarque, en se référant aux partitions qui étaient alors publiées. L’objectif était d’ « éviter de faire chanter à “contrepas” ». Les syllabes toniques des paroles doivent être calées sur les temps forts de la musique, eux-mêmes sur le pied gauche. Ces considérations phonologiques et musicales importantes et délicates ont été prises en compte dans les paroles des chants et dans les fichiers-sons, il suffit tout simplement de s’y reporter et de les imiter.

Sous son apparence traditionnelle, votre carnet de chant est très innovant. Comment a-t-il été conçu ?
Ce carnet de chants est un travail d’équipe. Elle est constituée d’un musicologue, Thierry Bouzard, et d’un musicien et chef de chœur, Gérard Eiselé. Ils ont été conseillés par Jean-François Durand, chef de musique hors-classe (ER) et l’ensemble a été revu par le capitaine (ER) Arno Bohner. Chacun apportant ses compétences spécifiques et indispensables. Consulté pour le projet, le colonel de La Chapelle, chef de corps du 2e REP a bien voulu mettre à disposition une de ses sections pour conduire l’expérimentation qui a permis de valider le concept.

Contrairement aux autres carnets, votre édition ne publie rien sur les traditions parachutistes ni sur l’historique de l’arme. Pourquoi en faire l’impasse ?
Nous publions un carnet de chants. Les historiques régimentaires et les traditions étant facilement disponibles, nous avons fait le choix de nous concentrer sur l’essentiel. C’est la raison pour laquelle vous trouvez 85 chants, beaucoup plus que dans les carnets habituels. Vous découvrirez ainsi des chants anciens et oubliés (Djebels, Para au rouge béret, Para descendu dans le vent, …) et des chants nouveaux (Sur les rives du Chari, Hello Boys, …). Avec les fichiers-sons, il devient facile de sélectionner ceux qui plaisent pour les faire vivre, même ceux que l’on n’a jamais entendus.

Vous adoptez un classement des chants inhabituel, même si les chants régimentaires figurent au début. Comment retrouver facilement les paroles d’un chant ?

Dans l’armée française, le chant relevant des usages, il peut avoir plusieurs titres, générant des pertes de temps quand il faut retrouver des paroles en repas de corps, en manœuvre ou en popote. Suivant l’usage, nous fournissons tous les titres des chants, ainsi que les incipits (début du 1er vers du chant), classés dans un index à la fin du carnet. Les chants régimentaires figurent en tête du carnet pour des raisons traditionnelles. Tous les autres chants sont classés par ordre alphabétique de tous leurs titres et incipits. Les titres sont tous imprimés en rouge, couleur qui leur est réservée. C’est-à-dire que les paroles se trouvent sous le titre principal et que les titres alternatifs figurent en bas de page, toujours dans l’ordre alphabétique. Exemple : un chant est entonné, vous ne connaissez pas son titre exact, vous feuilletez votre carnet en suivant les titres en haut et bas de pages. Vous n’avez pas besoin de passer par l’index.

Autre originalité de votre carnet, vous publiez plusieurs pages de conseils pour mieux chanter. Vous ne pensez pas que ces conseils sont un peu compliqués pour une pratique amateur ?
Tout d’abord, il fallait un minimum d’explications pour montrer comment fonctionne ce carnet interactif. Ensuite, ce carnet s’adresse à des professionnels qui ne peuvent pas cantonner la pratique du chant dans l’amateurisme. Évidemment, l’armée ne propose pas de cours chants, mais si le chant est un moyen de cohésion, il est aussi un outil de communication. Une bonne communication se doit d’être séduisante. Pour être bien entendu, le chant doit être agréable à l’écoute. Cela passe par le respect de certains principes d’expression, de respiration, d’attitude, … Ces conseils n’ont rien d’obligatoire. Ils ont été rédigés par un chef de chœur qui a la pratique du répertoire militaire. Figure aussi une méthode d’apprentissage d’un chant en 4 leçons. Pour ceux que ça intéresse, les conseils du carnet sont complétés par des conseils plus développés en ligne, avec des explications pour créer un chœur et les références sur les textes règlementaires concernant le chant dans l’armée. Il est même possible de proposer des chants nouveaux.

Vous avez publié l’année dernière un Grand Recueil des chants parachutistes, vous publiez maintenant un Carnet de chants des parachutistes, ces deux éditions sur un répertoire peu exploré par les civils ne font-elles pas double emploi ?
En réalité, la chanson de soldat reste très méconnue bien qu’il s’agisse du dernier répertoire de chants de métier. Les musicologues pas plus que les universitaires ne se sont penchés sur ces usages anciens ni ces créations nouvelles. Il fallait donc d’abord publier un ouvrage de référence. Un concours de circonstances a orienté les travaux sur les chants des parachutistes. La transcription des partitions publiées dans le Grand Recueil a servi pour concevoir les fichiers-sons du Carnet. Le premier s’adresse aux musiciens et aux historiens, l’autre aux soldats. Ce sont donc deux ouvrages plus complémentaires que concurrents.
En redonnant le goût du beau chant militaire, l’objectif à moyen terme est d’inciter à créer des chorales régimentaires. Cet objectif est parfaitement accessible puisqu’il existe déjà des chœurs dans les promotions d’élèves officiers et sous-officiers, ainsi qu’en corniches. Elles sont souvent de qualité comme en témoignent leurs enregistrements. Les compétences assimilées dans ces occasions pourraient être facilement exploitées en corps de troupe. La pratique du chant ne demande pas de moyens particuliers, juste un peu de temps et de bonne volonté, avec un retour sur investissement très profitable pour la communication de l’armée, si des prestations devant des spectateurs civils sont organisées. L’armée n’a évidemment pas la vocation à devenir un conservatoire de musique, mais il ne faut pas oublier que règlementairement depuis 1766, chaque régiment avait son orchestre. Pour des raisons budgétaires, ils ont disparu de l’échelon régimentaire, ainsi quelques chœurs pourront réintroduire une pratique musicale esthétique si nécessaire dans ce monde guerrier. C’est du moins le projet.

Vous voulez dire que vous allez poursuivre les publications de recueils de chants militaires avec des partitions ? Vous avez d’autres projets en cours ?
Effectivement, ces travaux s’appuyent sur des recherches conduites depuis des années. Le prochain recueil sera consacré aux chants des légionnaires. Il fournira les partitions et les historiques de tous les chants. Ce répertoire étant plus ancien que celui des parachutistes, il comporte donc plus de chants. Ce n’est pas la matière qui manque. Nous avons recensé plus de 2300 chants militaires. Il n’est évidemment pas question de tout publier. Néanmoins, nous disposons de documentation suffisante pour couvrir toutes les armes de l’infanterie, encore faut-il que la clientèle suive. Mais ce type de publication patrimoniale pourrait être soutenue car elle s’inscrit pleinement dans le projet du commandement d’utiliser la musique pour entretenir l’esprit guerrier au sein de la troupe.

Le Carnet de chants parachutistes : http://www.chants-parachutistes.fr/page ... chutistes/
Le Grand Recueil des chants parachutistes : https://www.diffusia.fr/militaire/531-l ... &results=3
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